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D'origine
italienne, installé en France
depuis 1982, Gualtiero Dazzi a
notamment suivi les cours de Franco
Donatoni, Luigi Nono, Pascal Dusapin,
Georges Aperghis et Tristan Murail.
Même s'il a composé de la
musique de chambre et symphonique, c'est
au théâtre, dans le rapport
entre texte et musique, que sa nature
s'exprime sans doute le mieux, raison pour
laquelle il a plusieurs fois joué
le rôle de dramaturge aux
côtés du metteur en
scène Stéphane Braunschweig
(notamment pour Le Chevalier imaginaire de
Philippe Fénelon au Châtelet,
en 1992. Son nouvel opéra, sur un
livret de Claude Clément, est un
conte musical, une fable qui peut aussi
bien s'adresser aux enfants qu'aux
adultes. Sur fond de carnaval et de grand
canal, il y est question d'un prince, d'un
violoncelliste, d'un luthier... et d'un
instrument magique qui ne se laisse
apprivoiser que par des doigts agiles mus
par un cur talentueux et
sincère.
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Le
compositeur Gualtiero
Dazzi
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Synopsis:
Descendant
d'un rayon de lune, Pierrot croise une
mendiante. C'est une conteuse:
conviée à un duel entre mots
et musique par un prince, au risque que
les poemes connus et inconnus soient
engloutis. La voilà à court
de mots, mais le prince lui a
accordé un sursis. Pierrot va
l'aider. Autour d'eux le peuple
vénitien s'agite. Soudain
inspiré, Pierrot commence
l'histoire du "Luthier de
Venise".
Dans
une rue de Venise, la boutique d'un
luthier donnait d'un côté sur
un canal, de l'autre sur un jardin
où poussait un grand arbre. Un chat
tenait compagnie à l'artisan,
chassant les oiseaux venant dans l'arbre.
Un jour, l'arbre mourut et perdit ses
feuilles. Le luthier envoya le chat
chercher des bûcherons pour
l'abattre. Une fois abattu, le bois fut
stocké dans la boutique. Le temps
passa, l'artisan devint vieux. Il se
souvint du bois, qui était sec et
entreprit d'en faire le plus parfait des
violoncelles. A la veille du carnaval,
l'instrument était
prêt.
Les
masques défilent et le luthier se
demande qui saura faire chanter son
violoncelle. Entre un
célèbre artiste,
masqué, accompagné de ses
admirateurs et admiratrices. Il veut jouer
l'instrument. Le luthier l'en dissuade:
seul un artiste talentueux et
sincère y parviendra. L'instrument
lui résiste. Vexé, il
s'obstine. Tous s'en vont, même le
chat, et le violoncelliste reste seul avec
l'instrument. Incarnation de l'âme
du violoncelle, la mendiante
apparaît. L'instrument joue et
quelques branches poussent au bout du
manche.
Sauvée
par ce nouveau récit, la mendiante
s'en retourne conter au prince une
histoire où mots et musique sont
réconciliés. Venise vivra
pour l'éternité.
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Critiques
Le
Figaro:
Carnaval
Voilà
de quoi vous réconcilier avec la
création lyrique. Ce Luthier de Venise,
écrit par l'Italien Gualtiero Dazzi, 44 ans,
d'après un conte pour enfants de Claude
Clément à la demande d'Octobre en
Normandie et du Châtelet, dépayse tous
les publics en une heure vingt. Un coup de baguette
magique et vous voici transportés sur le
bord du grand canal. Le metteur en scène et
scénographe italien Giorgio Barberio
Corsetti n'a pas lésiné. Le plateau
est victime de l'aqua alta : malheur à qui
n'emprunte pas planches ou briques disposées
à sa surface !
Une
dizaine d'acrobates s'y ébrouent dans un
joyeux feu d'artifice de cabrioles et de gerbes
d'eau pour évoquer le petit peuple de Venise
en compagnie de l'excellent Jeune Choeur de Paris
qui n'hésite pas à se mouiller non
plus dans les parties chorales traitées en
comédie musicale. Un vrai carnaval lyrique
!
Car
bonne humeur et nostalgie alternent ainsi à
mesure qu'on entre dans le conte du Luthier qui vit
avec un chat perché dans l'arbre unique d'un
jardin plein d'oiseaux. Mais l'arbre meurt et perd
ses feuilles. L'artisan va tailler dans le tronc
son propre chant du cygne, un violoncelle qui
attend son prince pour chanter. Ce sera le
merveilleux violoncelliste finlandais Anssi
Karttunen. Il s'est glissé
discrètement parmi l'orchestre de
l'Opéra de Rouen avant de gagner
l'échoppe du Luthier un soir de
carnaval.
C'est
simple et poétique : un chat, Christine
Buffle, un Pierrot, Catherine Dubosc, et une
Mendiante, Daniel Gundlach, entourent le Luthier de
Laurent Alvaro. Alain Altinoglu dirige joliment une
partition sans concession à la
facilité, mais qui sait descendre de son
piédestal pour entraîner le public
dans son rêve. Les adultes sortent d'un pied
léger. Les enfants ne mouftent pas. Signe de
réussite !
Liberation:
Opéra.
A Paris, une création
féerique du Milanais Gualtiero
Dazzi.
Acompte
de Noël
Le
Luthier de Venise
Présenté
en création mondiale il y a
quelques jours au festival Octobre en
Normandie, le Luthier de Venise est
actuellement donné au
Châtelet, commanditaire de ce
quatrième opéra du Milanais
Gualtiero Dazzi, né en 1960,
formé au Piccolo de Strehler, puis
à Paris, où il réside
depuis 1982.
Conte
musical sur un livret de Claude
Clément, le Luthier de Venise
s'ouvre sur une série de belles
images. Dans une lagune baignée de
lune, un Pierrot descend des cintres, et
tout, des costumes aux lumières
miroitant sur l'onde noire, respire -
équipe italienne oblige - la
Cité des doges captive des brumes.
Scènes de marché ou parade
de carnaval, félin furieux et
funambules à la corde : c'est
déjà Noël pour les
enfants, conviés par le
récit d'une mendiante à
entrer dans la maison du
luthier.
Ce
dernier vit avec un chat et rêve au
pied d'un arbre enchanté, qui finit
un jour par mourir. Du bois de cet arbre,
il fera un violoncelle magique qui ne
livrera son chant que sous les doigts
d'une âme d'exception. La musique
est au diapason des images :
néoclassique jusqu'au
madrigalesque, postmoderne (citation
ironique de la valse de la Traviata), mais
tout autant imprégnée
d'harmonie spectrale, même si les
pupitres de l'orchestre de l'Opéra
de Rouen ne possèdent pas cette
assurance qui permettrait de juger des
couleurs exactes recherchées par le
compositeur.
Le
reste de la distribution, du Chat de
Christine Buffle au Luthier de Laurent
Alvaro en passant par la Mendiante du
contre-ténor Daniel Gundlach est
fort correct. Hélas, le Pierrot de
Catherine Dubosc manque de
caractère. Ce qui n'aide pas
à se laisser captiver par une
écriture mélodique bien
traditionnelle et un sens de la prosodie
approximatif, voire fade.
La
star de la soirée, c'est le
violoncelliste Anssi Karttunen, qui fait
croire à cet instrument magique,
dont il joue à la ville comme
à la scène de façon
éloquente. Léger du point de
vue de la création lyrique, ce
Luthier séduira les
enfants.
Eric
DAHAN, samedi 16 octobre 2004
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Le
Chef d'Orchestre Alain Altinoglu avec
Anssi Karttunen
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La
Croix:
Un
« Luthier » tout en
féerie
MUSIQUE
De Rouen au Châtelet, « Le Luthier de
Venise », de Gualtiero Dazzi, offre un
spectacle magique. Reportage de notre envoyé
spécial.
LE
LUTHIER DE VENISE de Gualtiero Dazzi
Malgré
la crise de l'hiver dernier qui s'est soldée
par le départ « pour faute grave »
de son deuxième directeur, Philippe Danel,
suivi du passage éclair de Christian
Chorier, directeur du Théâtre de
Poissy, le festival Octobre en Normandie propose
une programmation assurée par
l'équipe mise en place par Danel dans
l'attente d'un nouveau directeur artistique.
Départements (Seine-Maritime, Eure) et
région (Haute-Normandie) ont maintenu les
subventions à 2 millions d'euros, et le
public confirme son intérêt pour la
manifestation : 20 000 spectateurs se sont
déjà présentés en dix
jours (ils furent 24 000 au total l'an dernier sur
un mois).
Parmi
la cinquantaine de rendez-vous, la création
mondiale du conte musical en 13 tableaux du
compositeur italien vivant en France Gualtiero
Dazzi (né en 1960), en coproduction avec le
Théâtre du Châtelet où il
est repris depuis hier. Écrit sur un livret
de Claude Clément d'après son livre
éponyme, Le Luthier de Venise est un
spectacle tout public où la féerie
est omniprésente et dont la
référence est L'Enfant et les
sortilèges de Ravel. Le compositeur a
pleinement réussi son pari : créer
une oeuvre chaleureuse et magique, facile et
joyeuse à chanter bien qu'exigeante tant du
point de vue musical que théâtral.
Quatre personnages, 25 instrumentistes et la voix
d'un violoncelle, au fil de deux degrés de
narration qui s'entrelacent et se
télescopent, plongent d'emblée dans
un univers poétique que la musique de Dazzi
enjolive et que la mise en scène de Giorgio
Barberio Corsetti illumine de ses élans
festifs et chatoyants.
L'action
se déroule à Venise où un
luthier partage sa passion entre ses violons, son
chat et son arbre. Lorsque ce dernier rend
l'âme, le luthier la fait passer dans celle
d'un violoncelle magique taillé dans le bois
vénérable. Dazzi rend hommage
à la chanson vénitienne, qu'il
superpose à la chanson napolitaine, le
passage d'une atmosphère à l'autre
gouvernant l'ensemble des 13 scènes de
l'opéra, les tableaux s'éclairant de
leurs contrastes.
La
partie chorale de cette première production
du Luthier de Venise a été
confiée au Jeune Choeur de Paris, centre de
formation créé en 1995 par Laurence
Equilbey qui, pour sa première prestation
scénique, se montre concentré et
heureux de participer à ce joyeux carnaval
aux côtés d'une distribution de
premier plan, où se singularise le
sémillant Pierrot de Catherine Dubosc (1),
tandis que Ronan Nedelec campe un luthier jovial et
tendre. Mais le « héros » du
spectacle est le violoncelliste Anssi Karttunen
dont le masque tragique, fait du bois de l'arbre
mort, laisse place au visage rayonnant du musicien
finlandais au moment où il se lance dans la
vibrante aria de l'âme du violoncelle. Au
soir de la création, Karttunen avouait son
bonheur de cette expérience du
théâtre, de sa collaboration avec le
compositeur et de ses contacts
privilégiés avec le jeune public. La
mise en scène et la scénographie de
Giorgio Barberio Corsetti sont une totale
réussite, par leur simplicité et leur
beauté plastique. Un spectacle
réjouissant auquel il reste à
souhaiter l'écho le plus large.
BRUNO
SERROU 15/10/2004
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